Inventaire du patrimoine culinaire du Centre
L’inventaire des trésors culinaires de la région Centre a paru en 2012. Commandé par le conseil régional du Centre et coordonné par l’Institut Européen d’Histoire et des Cultures de l’Alimentation (IEHCA-Université de Tours), cet état des lieux du patrimoine gourmand du coeur de la France constitue un événement majeur puisqu’il marque l’aboutissement d’un travail scientifique de référence. La France dispose désormais d’un outil de connaissance de son patrimoine gastronomique unique en Europe.
En 1989, était lancé, à l'initiative de Jack Lang, alors Ministre de la Culture, un programme de recherche visant à recenser le patrimoine culinaire de notre pays. La gastronomie et l’ensemble des patrimoines qui l’accompagnent avaient alors droit de cité au Ministère de la Culture.
Pour coordonner cet Inventaire du patrimoine culinaire de la France, une structure fut créée : le Conseil National des Arts Culinaires (CNAC). Un comité de pilotage d' « experts nationaux » fut mis en place qui comptait deux ethnologues, Laurence Bérard et Philippe Marchenay (CNRS, direction des enquêtes terrain), un agronome, Jean Froc (agronome à l'INRA, décédé en février 2009) et deux historiens, Mary et Philip Hyman (direction des recherches historiques). Cet ambitieux projet a donné lieu à la publication de vingt-deux volumes entre 1990 et 2003 aux éditions Albin-Michel.
Vingt-deux volumes qui forment désormais une collection prestigieuse, bien connue des gastronomes français. Le CNAC dut malheureusement cesser ses activités à la fin des années 1990 alors que trois régions restaient à couvrir : l’Auvergne, le Centre, la Réunion (et Mayotte).
L’Institut Européen d’Histoire et des Cultures de l’Alimentation, basé à Tours, ne pouvait se satisfaire de voir ce programme exceptionnel demeurer incomplet. Le conseil régional du Centre a lui aussi mesuré l’importance de ce projet et l’a soutenu sans réserve. En 2009 a donc commencé un important travail d’enquête, il s’achève aujourd’hui avec la publication de cet Inventaire du patrimoine de la région Centre.
Qu’est-ce qu’un inventaire du patrimoine culinaire ?
C’est d’abord un travail scientifique. Il s’est agi de répertorier les produits traditionnels de la région. Une sélection opérée en fonction d’un ensemble de critères.
Les produits retenus doivent :
- être commercialisés : être en vente, même en très petite quantité.
- jouir d’une réelle ancienneté : une profondeur historique de deux générations (cinquante ans) a été retenue
- être enracinés localement : le produit est lié à un lieu (localité, département ou région)
- bénéficier d’une certaine notoriété : même si cette renommée reste très locale
- correspondre à un savoir-faire particulier : le produit est le résultat d’un savoir-faire local partagé
- prétendre à une pérennité des techniques de production : tout en tenant compte de leur évolution naturelle
Le nombre de produits à traiter dépend naturellement de la taille de la région et de sa diversité, dans le cas du Centre, 110 produits ont été recensés.
Ce travail répond d’abord à un objectif culturel. Il vise à fixer la mémoire des savoir-faire agricoles et alimentaires traditionnels de nos terroirs. Il s’agit de réaliser un « état des lieux » et de le diffuser auprès du grand public. Rappelons que cet objectif revêt une importance toute particulière dans un contexte où l’UNESCO, à travers la convention de 2003 pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel réclame que « Pour assurer l'identification en vue de la sauvegarde, chaque Etat partie dresse, de façon adaptée à sa situation, un ou plusieurs inventaires du patrimoine culturel immatériel présent sur son territoire ».
Naturellement, un tel programme de recherche recouvre d’importants enjeux économiques. L’inventaire du Centre doit permettre le lancement d’actions spécifiques afin de conforter le dynamisme de certaines productions ou la relance d’autres restées méconnues voire en passe de disparaître.
Les enquêtes et la préparation du manuscrit
Une importante équipe a réalisé cette étude. Pour chaque secteur de production (charcuterie, produits des eaux, produits laitiers, boulangerie...) un responsable a été désigné. Sur le terrain, une équipe d’enquêteurs – principalement des étudiants du master Histoire et Cultures de l’Alimentation de l’université de Tours – a conduit de nombreuses interviews avec les producteurs afin d'obtenir les informations les plus précises possibles, sur les aspects techniques de chaque production mais également sur leur histoire.
Parallèlement à ces enquêtes terrain s’est déroulée une enquête historique, travail de collecte de documents. Le croisement d’informations, leur vérification par différents experts, a permis d’élaborer une série de 110 fiches-produits qui constituent l’inventaire même.